…un peu de silence…


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Vivre sa vie, un film de Jean-Luc Godard, 1962

Il y est question des mots et du silence.

 » (…)

Elle : Pourquoi vous lisez ?

Lui : C’est mon métier.

Elle : C’est drôle, tout à coup je ne sais pas quoi dire. Ca m’arrive très souvent. Je sais ce que je veux dire, je réfléchis avant de le dire pour savoir si c’est bien ça qu’il faut dire. Mais au moment de le dire… puff je ne suis plus capable de le dire.

Lui : Oui évidemment. Ecoutez, vous avez lu « les trois mousquetaires »?

Elle : Non, mais j’ai vu le film, pourquoi ?

Lui : Parce que. Vous voyez il y a là-bas Porthos, d’ailleurs c’est pas dans « les trois mousquetaires », c’est dans « vingt ans après ». Porthos le grand, le fort, un peu bête, il n’a jamais pensé de sa vie, vous comprenez. Alors une fois il faut qu’il mette une bombe dans un souterrain pour la faire éclater, il le fait, il place sa bombe, il allume la mèche et puis il se sauve naturellement. Et en courant tout à coup il se met à penser. Il pense à quoi? Il se demande comment il est possible qu’il puisse mettre un pied devant l’autre, ça vous est arrivé aussi sans doute. Alors il s’arrête de courir, de marcher, il peut plus, il peut plus avancer. Tout explose, le souterrain lui tombe dessus, il le retient avec ses épaules, il est assez fort, mais finalement au bout d’un jour, deux jours je sais pas, il est écrasé, il meurt.
En somme la première fois qu’il a pensé, il en est mort.

Elle : Pourquoi vous me racontez des histoires comme ça ?

Lui : Comme ça, un peu pour parler.

Elle : Mais pourquoi est-ce qu’il faut toujours parler ? Moi je trouve que très souvent on devrait se taire. Vivre en silence. Plus on parle, plus les mots ne veulent rien dire.

(…) « 

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Quand on ne sait pas le dire, on peut le chanter.

Parfois, dans les ateliers d’alfée avec les petits des IME, on est dans l’incapacité physique de parler. Cela ne nous empêche pas de chanter, moduler des sons, y mettre nos sens, et puis être ensemble. Communiquer comme ils disent. Au-delà du concept, c’est cela, être dans le sens. Parler n’est pas comprendre. Parler n’est pas forcément signifier. Avec les jeunes polyhandicapés, nous parlons avec nos instruments de percussion et nos voix, peu importe ce qu’elles sont. Nous faisons, ensemble, et c’est ce qui importe. C’est cela qui change tout. Dans nos singularités. Dans nos silences.

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Vous venez ?

 

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